Épisode 3 : " Mozar "
Saison 1
Écrit par Darky Day   


MARDI 24 FÉVRIER. QUELQUE PART AU DESSUS DE L'OCÉAN PACIFIQUE.


Le visage bleu balafré par la fumée blanche et aiguisée des réacteurs, le ciel admirateur devant les avions et leurs battements de coeur à moteur, suivait avec ferveur le Boeing de Gwadada Airlines de Hambourg à Pointe-à-Pitre, comme un enfant voulant l'autographe d'un acteur. Confortablement installé dans son fauteuil en cuir, Mozar regardait sur le miroir géant de l'océan, l'ombre de l'immense oiseau d'acier s'enfuir désespérément, poursuivi par des mâchoires d'eau, d'écume et de vent.

Pour voir la traduction française des passages soulignés ainsi, survolez-les avec votre souris.

 

 

Il ressemblait à un businessman respectable comme tous les autres passagers de la classe affaire. Sauf qu'il avait arraché les plumes de beaucoup d'anges pour se faire un masque de solitaire et malgré cela il n'avait jamais réussi à cacher son enfer. Orphelin, il n'avait pas grandi dans le luxe, l'amour, le caviar et les flacons à 1000 Deutschmark le parfum. Le Maître l'avait recueilli enfant dans les rues de Berlin alors qu'il mourait de faim. Il l'avait nourri, habillé, donné une éducation, une envie de vivre, un but. Aujourd'hui il lui devait tout. Il lui avait donné sa chance à boire et il avait tout bu jusqu'à la dernière goutte. Le Maître avait peu à peu remplacé son père, Malik. Cet espèce de bourrique alcoolique qui le battait lui et sa mère, Nana. Jusqu'au jour où, plus saoul que d'habitude, il l'avait frappée une fois de trop et ce fut tragique.


À l'époque le petit Setsa avait à peine 6 ans mais il lui avait sauté dessus avec un rasoir, tranché la gorge, avant de lui éclater la tête sur le piano. D'où son surnom de Mozar.

La suite : la rue, la famine, les vols, les sales boulots, les bagarres. Vingt ans plus tard, il avait troqué ses haillons de l'enfance contre des vêtements élégants, classes, lui donnant de l'importance comme si tous les jours étaient dimanche. Une veste blanche en lin tombant avec souplesse sur sa chemise en cachemire noire, un pantalon en lin blanc et des chaussures blanches. L'arbre de la vie avait planté ses racines dans sa souffrance et son envie de revanche. Heureusement les fruits du malheur étaient trop lourd et avaient fini par casser leurs branches.

Les années avaient passées mais sous ses airs calme, il avait gardé ce regard électrique de ceux qui décharge leur colère et disjoncte en un éclair. Caché sous sa veste dans un holster, il gardait férocement le secret du tonnerre dans son révolver. Assis à ses cotés un homme d'une trentaine d'années, chauve, obèse, les joues roses et rondes le mettait fort mal à l'aise. Avec ses pets, ses rôts et ses blagues niaises.


OBÈSE (s'adressant en créole à Mozar) : "Kôw fè, sa ka maché ? Ou ka palé kréyòl ? Bonjour, moi c'est Cédric. Je vous prie de m'excuser pour mes pets (proouut!). Mais j'ai mangé des chips et quand j'en mange des chips ça me fait péter (proouut!)."

MOZAR (d'un ton agacé, se passant les mains devant le visage) : "Alors arrêtez d'en manger ! Votre estomac sera moins dérangé !"

CÉDRIC (l'obèse) : "Mais sinon ça vous dérange si je me penche sur vous pour regarder par le hublot ? Je ne voudrais pas rater la Guadeloupe vu d'en haut. Elle ressemble à un joyaux. Un magnifique papillon de sable et de terre à la robe bleue et verte qui étend ses aîles, c'est tellement beau. (prooouut!!)"

MOZAR (à voix basse, d'un ton ferme) : "Non vous ne pouvez pas ! Et je ne le vous répèterais pas ! La prochaine fois que vous me pétez dessus, je vous tue !"

CÉDRIC (se penchant sur Mozar pour regarder par le hublot) : "Écoute-moi mègzolèt (maigrichon), je fais au moins cinq fois ton poids. Avec un seul doigt, je t'écrase comme une noisette. Alors si je veux regarder par le hublot, je regarde par le hublot et si je veux péter, je pète."


Sur ce, il se pencha sur Mozar et fit un pet. Que dis-je une tempête de cul sortie d'une autre planète (prooouuuuuuuut!!). Profitant que personne ne regarde, Mozar d'un coup sec, l'agrippa par le cou et lui cassa la nuque net. Puis il le reposa sur son siège, lui mit une couverture jusqu'au cou, des lunettes de mousse sur les yeux et fit descendre la tablette. Enfin, comme si de rien n'était, il recommença à lire tranquillement son "Brand New Magazine" avec la sublime Audrey en nuisette violette coiffée avec deux couettes léchant une sucette à la page dix-sept.


Une jolie hotesse de l'air en mini-tailleur rose, talons aiguilles rose et chemisier décoletté blanc. Tatouage sur les hanches (eh oui on est sexy sur Gwadada Airlines, sé pa joué !!) passa au même moment avec le chariot des repas et lui proposa une collation.


MOZAR : "Quelle est votre nom Mademoiselle ?"

HOTESSE : "Je m'appelle Lys. Est-ce que je peux vous proposer un whisky, un vin blanc ou un cognac avec un zest de citron ?"

MOZAR : "Non merci Lys, mais si vous avez du Rhum Vieux et un numéro, je veux bien un zest de téton."

LYS (l'hotesse, faisant mine de ne pas avoir compris) : "On a du Damoiseau si vous voulez. Et pour votre ami ce sera ?"

MOZAR : "Mon ami a dit de ne surtout pas le déranger, de le laisser dormir. Mais de lui prendre un sachet de chips. Il adore les chips."


Pendant que les passagers regardaient le film "Amour Créole" – avec dans les rôles principaux Tofo et Danitza : l'histoire d'un couple qui cambriolent les riches milliardaires de l'île, poursuivi par Marius un flic qui a la gâchette facile et la Mafia de Sicile (ma scène préférée étant celle où on les jettent nues aux crocodiles) – Lys et Mozar eux baisaient comme des bêtes dans les toilettes de l'avion. Leurs cris retentissaient dans tout l'habitacle faisant clignoter les lumières au plafond.

MOZAR : "Dîtes moi vous faîtes toujours l'amour à ceux qui vous demandent votre numéro ou c'est mon parfum aux effluves de bois bandé ?"


Deux heures plus tard, dans le parking de l'aéroport Pôle Caraïbes. S'épongeant le front avec un mouchoir en soie humide. Mozar rencontrait Stanley son contact sur place. Il monta dans un grand Hummer noir et se servit une dose de Rhum Vieux avec glace.

STANLEY : "Vous avez fait bon voyage, j'espère. Vous trouverez à vos pieds un sac avec tout ce dont vous avez besoin. Argent, faux passeport, clés de voitures et d'hôtels et votre arme automatique."

MOZAR : "Où est le prototype ?"

STANLEY : "Nous avons perdu sa trace au niveau de la Rivière Salée, monsieur. Il a massacré une jeune femme dans les marécages du Raizet. Il a sûrement arraché l'implant caché sous sa peau nous permettant de le localiser."

MOZAR (chargeant son arme et lui visant la tête) : "En gros vous ne me servez plus à rien."

Stanley mort de peur, le regarde dans le rétroviseur et lui tend la dernière édition du "Maco Magazine".

STANLEY (en bégayant) : "Par contre je sais où trouver Darky, Monsieur. Jetez un coup d'oeil sur l'article de la journaliste Ana Elle intitulé : «LE MEURTRIER DE MARYLOU"



COMMISSARIAT DE GAMBETTA, 13H30.



La nuit avait été dure pour Darky. Son compagnon de cellule un ivrogne SDF du nom de Jérémie, puant le vin et le salami, avait ronflé comme un porc toute la nuit.

À travers la porte de la cellule, les voix du Commissaire Proto et des inspecteurs Dombré et Pwarouj se mélangeaient à celle d'un homme au timbre suave et acide.

Un homme très élégant en costard Versace noir et cravate grise, mallette chromée à la main qui semblait les mettre dans une grande colère.

MAÎTRE ADEANS : "Bonjour messieurs, je suis Maître Willo Adeans. Je suis l'avocat de Monsieur Darky Day. Je suis venu payer sa caution."

LE COMMISSAIRE PROTO : "Sa caution est de 500 000 €, je doute qu'il ait les moyens de vous payer de toute façon."

MAÎTRE ADEANS : "Ne vous inquiétez pas pour cela. Monsieur Darky Day a des amis très puissants qui lui veulent du bien. Vous trouverez dans cette mallette la somme complète en billets de Vingt."

L'INSPECTEUR PWAROUJ (hors de lui) : "Vous ne pouvez pas accepter ça, commissaire !! Ce pourri a massacré une fille. Et déjà pour commencer, qui sont ces amis si puissants dont vous parlez ?"

MAÎTRE ADEANS : "Désolé mais mon employeur souhaite rester anonyme. Cette affaire déchaine la furie des médias et cela serait fâcheux pour les affaires de notre firme. Sur ce, je ne vais pas vous faire un cours d'économie plus longtemps. Veuillez libérer mon client, je repars avec lui immédiatement !"


Pendant ce temps là dans sa cellule. Avec du recul, Darky se sentait ridicule.

JÉRÉMIE (l'ivrogne chantant à tue-tête, tenant Darky fort par le cou) : "Proto dans son berceau bandait déjà comme un taureau, c'était tellement gros que ça passait sur RFO, aïe aïe aïe bandicolo des abricots, Proto est un maco !!! Allez Darky en choeur avec moi ! Lalalalala !"

DARKY (étranglé et dégouté par l'haleine du SDF) : "Lalalalalala-lâche moi, s'te plait !"

Soudain Pwarouj ouvre la porte de la cellule. Et les surprend bras dessus, bras dessous, une main sur une cuisse et l'autre dans un pull.

PWAROUJ (d'un ton ironique) : "Désolé de vous interrompre les tourtereaux pendant votre parade amoureuse. Si j'avais su je vous aurais apporté de la vaseline ou une lessive bien savonneuse."

DARKY (outré) : "Attendez Pwarouj ce n'est pas du tout ce que vous croyez. Je ne suis pas..."

PWAROUJ (lui coupant la parole) : "Darky ta sexualité ne me regarde pas. C'est bon t'es libre, on a payé ta caution. Tu t'en tires bien cette fois, mon salaud, mais sache que je te surveille alors fais attention !"

MAÎTRE ADEANS : "Si vous voulez bien me suivre Monsieur Day, on va y aller. Je suis Adeans votre avocat j'espère que vous avez été bien traité. Si vous voulez bien monter dans la voiture, je vous ramène chez vous."

DARKY : "Merci beaucoup Adeans, c'est Dieu qui vous envoie, encore dix minutes ici et je rentrai dans la chorale des trous de balle, à chanter : «Oh Mama Mia, donnez-moi l'absolution anale.» Si vous voyez ce que je veux dire. Euuh, sinon sur la route, ça vous embêterais si on passait chez Yannick «le magnifique», j'ai vraiment besoin d'un bokit."



PLUS TARD DANS LA SOIRÉE. BAIE-MAHAULT, 1H00 DU MAT.



Depuis quelle n'avait plus le Net chez elle, Isabelle venait souvent se connecter chez son ami et camarade de fac Kristofer.

Il était amoureux d'elle en secret et la laissait se connecter autant de temps qu'elle voulait ne serait-ce que pour humer son parfum et passer un moment à ses cotés.

ISABELLE (en partant, lui donnant une bise sur la joue) : "Bon ben, je te dis à demain Kristofer. T'es vraiment trop chou, je t'adore. T'es un garçon génial."

KRISTOFER : "Mais pas assez pour sortir avec toi, c'est ça ?"

ISABELLE (gênée) : "On a déjà parlé de ça. Je ne veux pas briser notre amitié avec une relation qui pourrait être gâchée. Je t'aime beaucoup tu le sais."

KRISTOFER (dépité, la tête baissée) : "Ouais, ouais, je comprend. À demain Isabelle."


Isabelle se moquait bien de la tristesse et de l'air de chien battu que prenait Kristofer. Ce qui comptait pour elle c'est de pouvoir parler à son copain Axel qui est en Australie. Sur le chemin du retour pour rentrer chez elle, elle parlait avec lui au téléphone.

AXEL (au téléphone) : "Alors tu étais encore connecté chez ce tordu de Kristofer ? Ce mec est bizarre. Il passe toute sa vie sur son écran. Franchement ça craint. Je ne veux plus que tu ailles chez lui !"

ISABELLE : "Ne t'inquiètes pas ce crétin est dingue de moi mais il ne fera jamais rien. Il est trop timide et trop lâche. Il n'a pas de couilles, c'est un minable. Non seulement il me laisse me connecter mais en plus il me passe son portable. Il me fait à manger, le con. Tu veux plus de jambon ? J'te rajoute des lardons ? Mais quel c... !"

KRISTOFER (qui l'avait suivit pour lui ramener son sac, a tout entendu, et la surprend en train de l'insulter) : "Si j'te faisais à manger et si j'te laissais te connecter c'est parce que je t'aimais. Alors comme ça j'ai pas de couille ??!!! Tu vas me le payer salope !!!"

ISABELLE (Morte de peur) : "Attend, c'est pas ce que tu crois, je vais t'expliquer..."

AXEL (qui a tout entendu au téléphone s'inquiète) : "Allô, allô, chéri, tu m'entends ??!! Qu'est-ce qui se passe ?!!"


Il n'a jamais eu de réponse. Le lendemain, on retrouva Isabelle, morte, le téléphone enfoncé au fond de la gorge.



PLUS TÔT DANS LA JOURNÉE. GAMBETTA, 15H.



À l'intérieur de la voiture stationnée devant le commissariat, une femme mystérieuse habillée en tailleur noir attendait Darky. Elle était magnifique. J'ai tout de suite été subjugué par sa plastique. Ses longues jambes semblaient dessinées par les pinceaux des anges, un sourire exquis le long de la bouche. Les cheveux ondulés coiffés en chignon, le regard pimenté qui te brûle dès que tu bouges. Elle avait les yeux cachés derrière des lunettes noires. Mais on pouvait quand même deviner la pureté et la malice de son regard. Maître Adeans roulait en direction de Basse-Terre au volant de la BM noire.

MAÎTRE ADEANS : "Darky, je vous présente Mlle Géraldine."

DARKY : "Enchanté. Je tiens à vous remercier pour avoir payé ma caution. C'est bon de savoir qu'il y a quelqu'un qui me sait innocent. Euuuh, par contre, ce n'est ni la direction de chez moi, ni celle de chez Yannick..."

GÉRALDINE : "...«le magnifique». Oui, je sais. Mais désolé Darky, on n'a pas le temps pour manger un bokit, ni un agoulou, ni un frédo burger, ni un poulet-frite. Tu ne te souviens pas de moi, je sais. Mais je n'ai pas le temps de tout t'expliquer. Ce que tu dois savoir c'est que ta vie est en danger et celle de milliers de tes contacts Facebook".

DARKY (estomaqué) : "Vous voulez dire que vous savez qui a tué Marylou Blue ?"

GÉRALDINE (d'un ton hésitant) : "Oui Darky, je sais qui c'est. Le meurtrier est..."




FIN DU 3ème ÉPISODE.




Dans cet épisode :

Olivier Mozar, Malik Zandronis, Nana Labor, Setsa Mc, Cedric Francis, Lys Lamra, Jean-françois Tofo Fidelin, Danitza Delbroc, Stanley-Benjamin Rinaldo, Ana Elle, Jérémie Malice, Olivier Proto, Willo Adeans, Yannick Abaul, Kristofer Vainqueur, Isabelle Urgin, Axel Aupetit, Lanteri Géraldine, Audrey Jack-roch.


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© Homines Nocturni Entertainment - Mars 2009.